Faire sauter ses PV : fini ?
Publié le 28 février 2011
Tags : PRESSE, JOURNAUX, LE PARISIEN
FAIRE SAUTER SES PV: FINI ?
Faire sauter les
PV reste un sport national, avec indulgence à tous
les étages. Jusqu'à un tiers «
disparaissent », démontre un rapport national
présenté ce matin. Le tour de vis sur les
routes va-t-il vraiment réussir à gripper le
piston ?
FOI DE SOUS-PRÉFET : « Pour payer un PV,
il faut vraiment ne connaître personne. »
Confidence d'un policier gradé sur le piston :
« Les élus interviennent à tous les
niveaux. » Observation d'un officier de
gendarmerie : « Comment voulez-vous motiver un
gendarme s'il y a des indulgences massives et qu'à
peine rentré au bureau (NDLR : après une
opération de contrôle) il y a huit demandes
d'indulgences pour dix PV ! » Tous sont
cités dans le rapport officiel rédigé
par le Conseil national de l'évaluation (CNE)
présenté ce matin par son président,
Michel Ternier.
Le document, dont « le Parisien »-«
Aujourd'hui en France » s'est procuré une
copie, décrit le système français de
contrôle et de sanctions des infractions
routières... et de ces multiples passe-droits.
S'appuyant sur des analyses quantitatives et de
nombreux entretiens avec des préfets, policiers,
gendarmes et procureurs, entre avril et mai 2002, le
rapport révèle qu'un tiers des amendes pour
excès de vitesse et 14 % de celles pour conduite
en état d'ivresse passent entre les mailles du
filet.
« En matière de vitesse, 61 % des amendes
forfaitaires sont payées, 25 % ne sont pas
transmises au ministère public (indulgences des
forces de l'ordre) et 2 % sont classées sans suite
par le ministère public », écrit
Michel Ternier. « En matière d'alcool, ces
amendes forfaitaires sont payées volontairement
dans 75 % des cas, 14 % ne sont pas transmises au
ministère public et 0,5 % d'entre elles est
classé sans suite.
».
L es «
disparitions » interviennent en majorité
avant leur enregistrement informatique. Sur
intervention d'une personnalité ou d'une relation
bien placée dans l'administration. Les simples PV
de stationnement ne sont pas seuls en cause. «
L'application de la rétention immédiate du
permis de conduire pour certaines catégories de
population est souvent remise en cause en raison
d'interventions émanant de notables locaux ou de
personnalités », peut-on lire en page 14
du rapport.
« Sanctions administratives » en cas
d'indulgence avérée
Le CNE - instance qui dépend du Commissariat
général au Plan - épingle les
méthodes employées par les forces de l'ordre.
« Il n'y a quasiment pas d'infractions
d'alcoolémie constatées parce que les
contrôles ne sont pas faits au bon moment
», rapporte ainsi un policier : « Ils sont
faits le matin à 11 heures.
»
Un sous-préfet déplore, lui, le « souci navrant » de « faire du chiffre ». Depuis la rédaction du rapport, la lutte contre l'insécurité routière a été promue priorité nationale par le président de la République , et Nicolas Sarkozy a exhorté, par circulaire, les forces de l'ordre à se montrer « exemplaires ». Avec « sanctions administratives » en cas d'indulgence avérée. Michel Ternier le reconnaît, « la situation a pu évoluer depuis l'annonce présidentielle de l'été 2002 ». Mais le ministère de l'Intérieur n'a pas communiqué pour l'instant de statistiques actualisées.
La baisse du nombre de victimes d'accident depuis le
deuxième semestre 2002 est « liée
essentiellement aux annonces gouvernementales
», estime le président du CNE, pour qui
« la mise en place des contrôles
automatiques est le point clé de la
réussite ». L'argument ne convainc pas
tout le monde : « Le système des radars
automatiques s'attache aux seuls excès de
vitesse », prévient Rémy JOSSEAUME,
juriste spécialiste de l'automobile. « Les
indulgences resteront de mise pour des infractions
graves comme la conduite en état d'ivresse et le
non-respect d'un feu rouge ou d'un stop.
»
Il existe toujours au Sénat un petit bureau dont
s'occupent quelques fonctionnaires des renseignements
généraux chargés de récupérer
les PV « à faire sauter » que leur
confient certains sénateurs.
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